Honneurs et négociations pour la visite à Paris de Mohammed Ben Salman, prince héritier saoudien

Emmanuel Macron et le prince héritier Mohammed Ben Salman, à Djeddah (Arabie saoudite), le 4 décembre 2021. BANDAR ALJALOUD / AP

C’est le principe des navires communicants adaptés à la diplomatie. A chaque fois que l’alliance entre les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite vacille, le deal entre le royaume et la France recommence. Ce théorème a été observé en décembre, lorsque le prince héritier saoudien Mohammed Bin Salman, traité de paria par Washington pour son rôle présumé dans le meurtre en 2018 du journaliste Jamal Khashoggi, a accueilli Emmanuel Macron à Djeddah.

L’axiome devait se vérifier une fois de plus, jeudi 28 juillet, avec la réception à l’Elysée du numéro deux saoudien, invité par le président français à un dîner de travail. L’homme surnommé “MBS” a certainement reçu la semaine dernière la visite du président américain Joe Biden, résigné à renouer avec le prince, espérant le voir augmenter la production pétrolière saoudienne et déclencher ainsi une baisse du prix de l’essence. Mais le locataire de la Maison Blanche est reparti bredouille, signe de la froideur persistante entre les deux hommes.

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Un écart dans lequel Emmanuel Macron semble vouloir s’engouffrer. Le chef de l’Etat a dû accélérer son retour de Guinée Bissau, où il se trouvait encore jeudi matin, au quatrième jour de sa tournée en Afrique, pour accueillir son hôte à l’heure prévue, à 20h30, à l’Elysée. Cour. Non content d’avoir été le premier grand dirigeant à se rendre en Arabie après l’affaire Khashoggi, le président français est devenu le premier homme d’Etat à recevoir le dauphin saoudien dans une grande capitale occidentale depuis le scandale.

Empêcher l’écart de se creuser davantage

Au-delà du poids de l’Arabie au Moyen-Orient, facteur qui, dans l’esprit de M. Macron, a rendu contre-productive la mise en quarantaine de Mohammed Ben Salman, plusieurs paramètres expliquent les honneurs que lui a conférés l’Elysée. La guerre en Ukraine, tout d’abord. Depuis le 24 février, le conflit accapare les Européens et leurs alliés américains, qui ont su resserrer les rangs face à la Russie de Vladimir Poutine, tant au sein de l’Union européenne que de l’OTAN. Pour Paris, il est désormais urgent de se tourner vers les pays qui refusent de choisir leur camp, en Afrique comme dans le Golfe, pour éviter que l’écart avec eux ne se creuse encore plus.

Le sort imminent de l’accord sur le nucléaire iranien est également important. La relance de cet accord, dont l’ancien président américain Donald Trump s’est retiré en 2018, reste bloquée par des différends persistants entre les États-Unis et l’Iran. Mardi, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a présenté aux parties un texte de compromis, les exhortant à l’accepter pour éviter une “crise nucléaire dangereuse”. Téhéran continue de violer ses engagements initiaux et s’approche du point où il aura accumulé suffisamment de matière fissile pour s’équiper d’une bombe dans quelques mois.

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