La Première ministre, Elisabeth Borne, prononce son discours de politique générale à l’Assemblée nationale le 6 juillet 2022. JULIEN MUGUET POUR « LE MONDE »
Il devait souvent élever la voix pour étouffer les huées d’un public en partie hostile. Alors qu’elle montait sur la tribune de l’Assemblée nationale, mercredi 6 juillet, pour proclamer sa déclaration de politique générale, la Première ministre Elisabeth Borne savait qu’elle ne bénéficierait d’aucune clémence. Ses paroles, soupçonnait-il, seraient couvertes d’autant d’invectives que l’esprit de ses partisans compenserait à peine.
A la tête d’une majorité relative, la sexagénaire ignorait qu’elle ferait face au ressentiment d’une opposition qui s’était sentie méprisée pendant les cinq années précédentes. Elle s’y était préparée. C’est pourquoi, sans doute, le locataire de Matignon n’a pas tenté, mercredi, de convaincre les parlementaires. Une perte de temps à ce stade. Le chef du gouvernement a voulu se défendre. Et imposer. L’a-t-elle compris ? L’avenir nous le dira.
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Mais après un peu plus d’une heure de propos centrés sur la répétition du programme présidentiel d’Emmanuel Macron, émaillé d’annonces peu fréquentes, comme la future nationalisation de l’électricien EDF, l’ancien préfet, ingénieur, a soudain oublié le « nous » pour passer au “je”.
Dans une diatribe féministe et personnelle, la femme que l’on dit robotique et froide, “techno” et sévère, soupçonnée même au sein de son camp de ne pas être à la hauteur, est sortie quelques instants de sa coquille pour s’adonner à la confiance. . “Si je suis ici devant vous, Premier ministre de la France, je le dois à la République. C’est elle qui m’a tendu la main (…) quand j’étais ce garçon dont le père n’était jamais revenu des camps », a-t-il expliqué sans s’énerver. Une référence à son parcours d’enfant abusé par la vie. Élevée par une mère célibataire après le suicide de son père, rescapé d’Auschwitz, alors qu’elle avait 11 ans, Elisabeth Borne est nommée tutrice de la nation.
Alors oui, « ça ne correspond peut-être pas au portrait composite auquel certains s’attendaient. Ça tombe bien, la situation est inédite. Je n’ai pas le complexe de la femme providentielle. J’ai été ingénieur, femme d’affaires, préfète, ministre. ne suivait qu’un fil rouge : servir », confiait-elle avant de rendre, les mains sur les hanches, un hommage appuyé à la République et aux femmes qui, comme elle, ont dû se battre pour s’imposer en politique : Irène Joliot-Curie, Suzanne Lacore, Cécile Brunschvicg, Simone Veil ou Edith Cresson, la première femme Premier ministre.
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