C’était un avertissement attendu depuis longtemps; le Comité consultatif national d’éthique considère que l’assistance active à un décès sous surveillance stricte est possible, dans un avis rendu public mardi 13 septembre. Alors que plusieurs pays ont modifié leur législation respective depuis dix ans et que le Parlement français en a débattu, le CCNE avait mis en place, en juin 2021, un groupe de travail pour réfléchir à nouveau aux enjeux éthiques de la fin de vie. La publication du nouvel avis du comité d’éthique enclenche formellement une séquence qui pourrait déboucher sur un texte de loi.
“Il y a une voie pour une application éthique de l’aide active à mourir, sous certaines conditions strictes avec lesquelles il paraît inacceptable de s’engager”, a déclaré lors d’une conférence de presse Alain Claeys, l’un des intervenants d’un avis rendu ce mardi par l’institution.
“Je suis convaincu qu’il faut bouger car il y a des situations inhumaines qui perdurent et auxquelles il faut apporter des réponses”, a déclaré Emmanuel Macron ce lundi, de son côté, lors d’une rencontre avec l’Association de la presse présidentielle. Le chef de l’Etat a notamment évoqué le cas des personnes “adultes, conscientes” qui souffrent de maladies incurables. Sur cette question, il n’exclut pas l’organisation d’un référendum.
Il a évoqué le lancement d’une convention citoyenne “à partir d’octobre”. “L’idée”, a-t-il poursuivi, “c’est de nous donner environ six mois et, selon les réponses et retours d’expérience (…), avant fin 2023, si nécessaire, de changer le cadre légal”. “C’est un de ses engagements de campagne. Il avait dit vouloir un débat apaisé et soucieux des opinions de chacun”, rappelait-on récemment à l’entourage présidentiel.
La grande réforme sociale d’un éventuel second quinquennat serait “le droit de mourir dignement”, a déclaré l’ancien président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle.
Sur un plan “personnel”, Emmanuel Macron s’est montré “favorable à une évolution vers le modèle belge”, lors d’une sortie avec des Français lors d’un déplacement de campagne. ” [Mais,] fondamentalement, mon opinion personnelle n’a pas d’importance”, a-t-il déclaré lundi.
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Interdiction de l’euthanasie et du suicide assisté
Jusqu’à présent, la loi Claeys-Leonetti encadre la fin de vie des malades en phase terminale en France. Adoptée en 2016, après une première version en 2005, elle interdit l’euthanasie et le suicide assisté, mais autorise “la sédation profonde et continue jusqu’à la mort” pour les malades en phase terminale souffrant de grandes souffrances, dont le pronostic vital est engagé “à court terme”.
Si l’euthanasie est autorisée dans plusieurs pays européens comme les Pays-Bas, la Belgique et, plus récemment, l’Espagne, le débat sur sa légalisation et sur le suicide assisté est ancien. Lors du précédent quinquennat, l’exécutif avait décidé que la fin de vie ne figurerait pas dans son projet de loi bioéthique, rappelant qu’elle faisait l’objet de la loi Claeys-Leonetti.
En 2018, le Conseil d’État puis la commission d’éthique ont statué qu’il ne fallait pas modifier cette loi et réclamé un meilleur accès aux soins palliatifs. Depuis, le contexte a changé.
“Le droit de mourir dignement est un combat qui vous ressemble et qui nous oblige”, a déclaré Emmanuel Macron le 2 septembre, en remettant la grand-croix de la Légion d’honneur à la chanteuse et comédienne Line Renaud. “C’est le moment de le faire… Nous le ferons”, a-t-il ajouté. Mme Renaud a annoncé le 11 août sur Twitter qu’elle avait rejoint l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), dont elle est également la marraine. “J’espère que cette loi sur la fin de vie passera, et vite !”, a-t-il déclaré dans une interview au Parisien publiée ce mardi.
Majorité à l’Assemblée
Pour Jean-Luc Romero-Michel, ancien président de l’ADMD, l’exécutif dispose désormais d’une “énorme majorité” pour voter sur ce texte. La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, souhaite que “le Parlement puisse se saisir rapidement d’un texte relatif à la fin de vie”.
En avril 2021, l’Assemblée nationale en avait déjà débattu suite à une proposition de loi du député Olivier Falorni. Son examen avait échoué en raison de milliers d’amendements destinés à l’entraver, mais 240 députés avaient approuvé le principe de “l’aide médicale active à mourir”.
Si une nouvelle loi sur la fin de vie peut convenir à gauche et une partie du centre, elle peut susciter de fortes réticences à droite et à l’extrême droite.
Et, chez les soignants, des mises en garde ont déjà été émises. Si la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) est favorable à l’idée d’une convention, sa présidente, Claire Fourcade, a ainsi souligné qu’une éventuelle évolution de la loi ne devrait pas compromettre les soignants.
Une dizaine de sociétés savantes des professions concernées par la fin de vie ont également exprimé leur inquiétude quant aux conséquences éthiques et déontologiques sur leurs professions d’une éventuelle évolution législative.
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Le Monde avec AFP et Reuters