Italie : Mario Draghi démissionne, le président Sergio Mattarella refuse

A l’origine de la crise, l’éclatement du mouvement Cinq Etoiles, membre de la coalition, qui a boycotté un vote de confiance au Sénat. Le président du Conseil doit s’adresser aux parlementaires le mercredi 20 juillet.

Ceux qui croyaient que Mario Draghi était installé jusqu’au printemps 2023 comme président du conseil italien ont brutalement déchanté jeudi. Car l’Italie est de nouveau plongée dans une crise politique dont l’issue est encore incertaine. Jeudi soir, le président du Conseil Mario Draghi a remis sa démission au président républicain Sergio Mattarella. Mais il l’a immédiatement rejeté. Et il lui a expressément demandé de venir au parlement mesurer le soutien dont son gouvernement actuel pourrait encore bénéficier. Car au moment où l’Italie doit faire face à plusieurs crises, dont une crise énergétique et le retour de l’inflation qui appauvrit sa population, et où elle doit réaliser un plan d’investissement de 200 milliards d’euros avec l’aide providentielle de l’Europe, Sergio Mattarella entend à tout mettre en œuvre pour que le gouvernement de Mario Draghi, qui a restauré le crédit de l’Italie à l’étranger, perdure jusqu’à la fin de la législature de mai prochain.

Ainsi, mercredi 20 juillet, Mario Draghi, qui n’a pas formellement démissionné depuis qu’il a refusé, devrait s’adresser aux parlementaires qui vont devoir assumer leurs responsabilités. Cinq jours pendant lesquels la destination de l’Italie peut changer. Car on saura alors si la grande majorité sur laquelle repose son gouvernement depuis février 2021 peut encore fonctionner, malgré l’approche des élections qui poussent chacun à jouer son rôle. Ou si, dans le cas contraire, le président de la République devra convoquer des élections anticipées à l’automne.

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A l’origine de la crise, la rupture du mouvement Cinq Etoiles qui avait soutenu le “gouvernement d’union nationale” lors de sa création en février 2021. Après des jours d’affrontements, de menaces verbales et de médiations infructueuses entre Mario Draghi et le chef du Giuseppe Conte, les sénateurs du M5S décident de ne pas voter le plan d’aide de 23 milliards d’euros en faveur des ménages et des entreprises, qui s’accompagne d’un vote de confiance au gouvernement. Avec un prétexte bien moindre au regard du vrai pari pour tout le pays : la présence dans le décret-loi soumis au vote d’une règle qui permettrait à Rome de se doter d’un incinérateur de déchets, qu’ils jugent coûteux, polluant et inefficace.

Mais derrière cette rupture se cache surtout la tentative désespérée d’un mouvement, qui est passé de 34 % des suffrages exprimés en 2018 à 11 % des intentions de vote aux prochaines législatives, de reconquérir une partie de ses électeurs qui s’étaient abstenus. “Des dirigeants de Five Star prévoient depuis des mois d’ouvrir une crise pour mettre fin au gouvernement de Draghi”, a déclaré jeudi le ministre des Affaires étrangères Luigi Di Maio, ancien dirigeant du mouvement qui l’a quitté il y a un an. il fonde un nouveau groupe parlementaire, IPF pour Together for the Future. Et il a expliqué : “Ils avaient neuf mois de campagne électorale pour se rendre aux urnes, mais ils ont donc condamné le pays à tomber dans le précipice économique et social.” Une stratégie jugée aussi incompréhensible que risquée, tant le déménagement risque d’être le grand perdant de la prochaine élection. En tout cas, les sénateurs du M5S ont donc choisi, jeudi midi, de quitter l’hémicycle au moment du vote.

Grande majorité

Si toutefois la confiance au gouvernement a été votée par 172 voix, la grande majorité sur laquelle Mario Draghi avait soutenu son gouvernement n’existe plus. Et Mario Draghi, qui avait prévenu toute la classe politique des conséquences de cette rupture, en a immédiatement pris acte et, conformément à ce qu’il avait annoncé, est monté au Quirinal pour s’entretenir avec le président de la République.

En réunion de son cabinet jeudi soir pour annoncer sa démission, Mario Draghi a justifié sa décision ainsi : « La majorité d’union nationale qui a soutenu ce gouvernement depuis sa création n’est plus là. Le pacte de confiance sur la base de l’action gouvernementale a disparu. Le président du conseil dit qu’« il a voulu continuer sur la voie commune, en essayant de répondre aux sollicitations qui m’étaient adressées par les forces politiques ». En effet, Giuseppe Conte lui avait adressé il y a une semaine une note en neuf points à ses conditions pour que le mouvement Cinq Étoiles reste majoritaire : notamment l’instauration d’un salaire minimum (qui n’existe pas en Italie) et d’un ensemble de mesures en faveur des ménages les plus pauvres.

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Aussi, à l’appel des partenaires sociaux il y a trois jours, le gouvernement Draghi a promis de présenter fin juillet une politique des revenus au profit des travailleurs les plus défavorisés, qui comprend la mise en place d’un salaire minimum et la mise à jour des conventions collectives. . Cependant, Draghi a refusé de céder à la demande de Giuseppe Conte de financer une aide supplémentaire en augmentant le déficit. “Ce vote au parlement montre que cet effort n’a pas été suffisant”, observe Mario Draghi, qui rappelle avoir toujours dit que cet exécutif n’avancerait que s’il y avait une perspective claire de pouvoir mettre en œuvre le programme gouvernemental sur lequel les forces politiques avait voté la confiance. Cette unité a contribué à relever les défis de ces mois. Ces conditions ne sont plus réunies aujourd’hui. Deux jours plus tôt, lors d’une conférence de presse, il avait juré qu’il n’y aurait pas d’autre gouvernement Draghi.

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